Ceci n’est pas un rêve. Je me souviens de mon escapade en latitude, sur des terres brutes mais authentiques. Un songe parmi tant d’autres depuis. J’ai pourtant encore les sensations intactes en ma ma mémoire.
Cette fuite vers l’avant qui m’amenât au-delà de ce que je pouvais m’attendre. Dans le tréfonds de mon être où règne l’obscurité, où mes écrits demeurent.
Nous avions marché sur une belle distance, avec beaucoup de poids à libérer au grès de nos pas. Le bruit quasi inexistant, la lumière éternelle et les barres vitaminées que je mangeais dans une quantité inégalable. Soulagée de fermer les yeux sur une journée à l’intensité si rare. Et dans l’enthousiasme d’une nuit pourtant si courtes, se réveiller avec milles idées, la voie dégagée sur un air magique.
Dans l’entrain d’une matinée nouvelle, j’ai mis les pieds dans un autre monde. Je regardais hagarde ou ensorcelée mes compagnons de route gambader et courir se cacher derrières la roche noire, portés par l’ivresse d’une lumière furtive, d’un nuage solitaire, d’une couleur soudainement apparue, comme le prisme et la pluie. Tout un royaume, pour un instant d’éternité.
Des bruissements, qu’il m’a semblé entendre, crescendo, une mélodie familière. Ainsi je m’attardai et m’arrêtai. Peut-être fut-ce les battements de mon cœur, qui pouvaient prendre plaisir à entrer dans la danse. Des chuintements, dès lors que je m’approchai, prise dans les filets. Des petits ricanements ? J’ai cru apercevoir des silhouettes si tenues se mouvoir en cadence autour de brindilles qui s’enflammèrent subitement pour s’éteindre lentement. Mon corps se mit à flotter succinctement et l’atmosphère vaporeux se changer pour m’emporter dans leur spectacle. Mon cœur se détacha, il bondit au-delà de ma chaire. Les silhouettes s’en été emparées. Et l’une d’elle me jeta des regards, il me sembla la reconnaître. Il fut un homme, recouvert d’une nuit dorée, une âme sauvage qui me tendit la main et m’amena au-dessus des nuages.
Lointains, mes souvenirs allèrent. J’ai détaché ma peine et j’ai suivi les chants psalmodiés. Je regardai ses épaules bouger et ses cheveux longs s’arc-bouter dans la frénésie de la danse. Je ne sentis plus rien, à part le doux plaisir d’avoir été invitée. Je ne su pas où j’étais, quelque part où naquit ma poésie.
Des petits rires continuèrent de résonner alors qu’il me semblât avoir cligné des yeux et vu défilé d’autres images, depuis le ciel étoilé jusqu’au magma éclatant des chemins sempiternels. Je l’entendis toujours respirer à mes côtés. Je savais.
Sur cette terre volcanique où pousse le lichen j’ai vu le vivant s’animer de milles couleurs, bien plus nombreuses et libres. Je caressai les barbes, ris aux éclats et toute petite je me fis pour trouver une feuille et m’y abriter. Je revis sa main tendue, pour m’inviter à venir danser.
La mélodie dans le corps, son regard posé sur moi je me retrouvai allongée dans un lit simple, entourée de mes compagnons de voyage. Le refuge semblait calme jusqu’à ce que j’entende le coupable, un téléphone qui vibrait et chantait allégrement. Alors je me suis retenue pour ne pas égrainer quelques paroles de malédictions à tout vent. C’était il me semble il y a quelques millions d’années.
Tu peux te boucher les oreilles ou te laisser emporter par le flot de l’instant. Ce flot si puissant qui creuse depuis en toi, ce dont d’affronter le monde comme une éternité ».